Dans un article sur Passeportsanté , on donne une liste de tue-l’amour qui a fortement attiré mon attention. Négativement parlant, me dois-je de préciser.
Selon moi, un tue-l’amour serait quelque chose qui, en quelque sorte, détruirait la relation amoureuse.
Ce serait des expériences tellement désagréables, capables de remettre en question le grand amour.
Un tue-l’amour ne peut pas être, à mon sens, le fait qu’une personne ne pratique l’épilation, une faute de goût, des ongles sales…
Le tue-l’amour est, je crois, beaucoup lié à des différences idéologiques et logistiques entre les partenaires, plutôt qu’à des détails en lien avec l’utilisation ou la non utilisation de déodorant.
Je vais tout d’abord commencer par tenter de déconstruire l’article horripilant de Passeportsanté mentionné ci-dessous.
Puis j’esquisserai ce qui pourrait être, à mon sens, un véritable tue-l’amour.
” TOP 10 des pires tue-l’amour ” : Critique
Le premier tue-l’amour selon Passeportsanté est l’odeur corporel :
1. Les odeurs
Les odeurs corporelles, quoi de plus naturel ? Cependant, une hygiène douteuse peut représenter un véritable « tue-l’amour ». D’après un sondage du groupe SCA, spécialiste des produits d’hygiène, 25 % des Françaises et 22 % des Français ont déjà mis fin à une relation amoureuse à cause de la négligence de leur partenaire. “
Cela me paraît très extrême comme tue-l’amour. Se mettre en relation amoureuse avec une personne puis arrêter cette relation à cause d’un partenaire qui ” se néglige “… l’odeur corporelle serait-elle la véritable raison de la fin de la relation ?
Certes, nous ne sommes pas capables de supporter absolument toutes les odeurs corporelles. Certaines nous semblent trop fortes.
Cependant, les odeurs corporelles lancent réellement des messages, des signaux très forts.
Et si vous ne supportez pas l’odeur d’une personne, et bien, c’est peut-être elle qui ne vous supporte en fait pas. Ça peut être un message de rejet.
En effet quand une personne se sent mal en présence d’une autre personne, elle peut émettre des odeurs corporelles désagréables, une sorte bouclier protecteur.
De même, quand on ne va pas bien, quand on est malade, quand on est stressé.e, quand on est en colère, quand on est anxieux.se, bref quand on ressent des émotions négatives, on émet parfois des odeurs corporels désagréables.
Dans une relation amoureuse, il y a des raisons plus profondes à creuser si on ne supporte pas l’odeur corporelle de sa ou de son partenaire.
Les odeurs cachent des raisons beaucoup plus importantes et très intéressantes à explorer.
Cela n’arrive pas par hasard et s’il y a véritablement de l’amour entre les personnes et si les personnes ont de l’amour pour soi alors il y a intérêt à explorer la question en profondeur sinon on s’arrête à du pure body shaming.
2. Le métrosexuel
Sentir bon, oui, passer des heures à se préparer, non. Les avis peuvent être mitigés mais la plupart des femmes sont intraitables : un homme qui passe plus de temps qu’elles dans la salle de bain, ça ne les fait pas rêver. ” J’adore ce soit-disant tue-l’amour. C’est hilarant.
Alors que précédemment on rejette une personne qui était notre partenaire à cause de son odeur corporelle désagréable, maintenant, on rejette une personne qui prend trop soin d’elle et qui va potentiellement plus chez l’esthéticienne que soi-même.
On continue là, toujours dans le body shaming. Tu prends trop soin de ton corps, c’est trop ! WTF.
Par ailleurs, c’est totalement sexiste et genré. Pourquoi une femme aurait le droit de passer des heures des heures de sa vie à se pomponner mais un homme qui ferait la même chose risque de voir sa relation amoureuse avec une femme s’achever ?
Je ne vais pas expliciter ce qui cloche ici. C’est flagrant.
De plus, le titre de ce deuxième tue-l’amour est LGBTQ+phobe. Non merci.
3. Les ongles sales
Toujours concernant la propreté, les ongles sales sont un autre tue-l’amour. Des ongles propres signifient pour beaucoup que la personne prend soin de son hygiène corporelle. Ongles rongés ou mal taillés, sont également à proscrire. Les mains propres ont aussi leur importance et sont souvent citées comme un élément stabilisateur du couple. C’est en tout cas l’avis de 45 % des femmes et 38 % des hommes. “
On assiste à un véritable festival de body shaming. Comme si les odeurs corporelles et le métrosexuel ne suffisaient pas ! Rajoutons une couche avec cette histoire d’ongles sales.
Encore une fois, considérer les choses de cette manière, c’est vraiment réduire les êtres humains et les relations humaines à des histoires superficielles pour ne pas s’intéresser au fond de la question ou du problème.
Cela, en outre discrimine les personnes qui font un travail physique et où leurs ongles sont exposés en permanence à la terre, à la poussière, à la saleté.
Ou encore les personnes qui souffrent de ronger leurs ongles et qui aimeraient vraiment arrêter sans y arriver.
Parler des ” mains propres (…) comme élément stabilisateur du couple ” me révolte. Ça ne fait pas sens mais ne fait qu’approuver les pensées discriminatoires et la pratique banalisée du body shaming.
4. La propreté en général
Selon l’étude Hygiene Matters, les femmes sont plus attentives que les hommes à certains détails, perçus comme marqueurs de propreté : elles sont par exemple 26 % à se dire gênées par des cheveux sales (contre seulement 10 % des hommes) et 21 % par des vêtements sales (contre 15 % des hommes). “
Je ne vais pas m’attarder à trop commenter ce tue-l’amour car il rejoint les idées énoncées précédemment sur le body shaming.
5. Les pets au lit
Difficile d’y échapper. En moyenne nous produisons tous des flatulences (ou plus couramment des « pets ») 13 à 21 fois par jour. En émettre plus que la normale est sûrement dû à l’alimentation. Pas de panique, cela devrait passer après la digestion complète des aliments. En couple, il est préférable de les réaliser avec discrétion. “
On continue avec une série de critères approuvant le body shaming.
Le conseil final est succulent : ” En couple, il est préférable de les réaliser avec discrétion. ” Ici, ce qui est dit c’est que les pets sont naturels, c’est comme cela, on n’y peut rien, on pète, c’est tout, il faut péter mais alors… les conditions des pets en couple sont différentes. Sans commentaire.
6. Les poils sur les jambes
L’épilation constitue un réel critère de sélection amoureuse selon un sondage réalisé par le site de rencontres Emmanuelles, notamment pour les femmes. D’ailleurs, 81 % des femmes célibataires s’épilent avant un rendez-vous.
Les poils en général
D’après une étude réalisée par Glossybox auprès de 6 000 femmes de 18 à 40 ans, en 2017, une femme sur deux choisirait son type d’épilation par rapport aux préférences de son conjoint. En outre, plus d’une Française sur deux déclare avoir déjà écourté un rendez-vous avant que les choses sérieuses ne commencent car elle n’était pas épilée. “
Ceux-ci sont une injonction à caractère indiscutablement sexiste. Les femmes doivent s’épiler sinon elles risquent de se voir rejeter par les hommes alors que les hommes, dans la plupart des cas, n’ont pas à le faire. Déterminer la beauté féminine par l’épilation est une aberration.
Par ailleurs, non seulement on exige socialement des femmes qu’elles s’épilent mais en plus leur conjoint aurait un mot à dire sur la façon de s’épiler !
C’est une autre forme de body shaming sexiste.
Les beautés sont diverses et variées. La norme de l’épilation chez les femmes n’est qu’une manifestation d’un outil de domination masculin sur la soumission féminine. Alors, libérez-vous et faites vos propres choix !
8. Les chaussettes pour faire l’amour
Dans la liste des tue-l’amour, la chaussette est très souvent nommée, notamment au lit. Mais plusieurs études viennent tordre le cou à ces clichés tenaces et s’accordent à dire que le fait de porter des chaussettes pour faire l’amour permet d’avoir un orgasme plus facilement.
Les sous-vêtements sales
Les sous-vêtements étant en contact direct avec la peau, ils absorbent tout ce que le corps rejette (transpiration, sang, matières fécales)… C’est pour cette raison qu’il est nécessaire de les laver après une seule utilisation.
Or, selon le sondage de Yougov, 1 homme sur 3 porterait son caleçon plusieurs jours d’affilée avant de le mettre à laver. Du côté des femmes, les chiffres indiquent qu’elles ont une meilleure hygiène, même si elles restent 19 % à porter leur culotte plusieurs fois de suite. “
Jamais sept sans neuf ! Les chaussettes ne peuvent pas être un tue-l’amour.
Comment est-ce qu’une pauvre petite paire de chaussettes pourrait retirer l’amour pour un.e autre. A.B.S.U.R.D.E.
Pourquoi pas même une petite paire de chaussettes sexy pendant l’amour ?
10. S’intéresser à l’autre
Marine Salama, psychologue, explique que parler uniquement de soi n’est pas ce qu’il faut faire pour séduire quelqu’un. Ainsi, il est important de lui montrer un réel intérêt.
Attardez-vous sur les détails que vous avez appris lors de vos échanges. Ils peuvent paraître insignifiants mais qui ont leur importance.
Et même si vous ne partagez pas tout à fait les même passions, montrez-lui (ou elle) que vous êtes de nature plutôt curieuse, ouvert d’esprit et prêt à découvrir de nouveaux centres d’intérêts. “
Enfin, un vrai tue-l’amour qui fait sens et avec lequel je suis d’accord.
Il n’y a rien de plus repoussant qu’une personne qui ne fait que parler d’elle, qui ne pense qu’à, pour laquelle tout tourne autour d’elle, qui est égocentrée, qui n’a d’yeux que pour elle-même et qui ne laisse pas la place aux autres.
Personnellement, les interactions avec les personnes qui ne s’intéressent qu’à elles-mêmes sont trop limitées à mon goût et il est très désagréable de se retrouver dans la position de celle qui pose les questions sans cesse, la journaliste en somme, alors que l’autre personne en face répond à mes questions sans me les retourner ni nourrir la conversation de sorte à m’y inclure.
Ce que j’entends par tue-l’amour
À mon avis, un tue-l’amour est un obstacle idéologique et logistique qui empêche une personne de continuer à aimer une autre personne.
Cette obstacle va se remarquer entre autres dans les interactions. Le point numéro 10 mentionné dans l’article critiqué ci-dessus est un excellent exemple.
L’obstacle dans cet exemple réside dans le fait que, pour l’un.e, il est tout à fait normal de parler de soi sans forcément s’intéresser à l’autre – pour une raison ou pour une autre – alors que, pour l’autre, c’est très violent de vivre ce type d’interaction seulement centrée sur un individu.
D’une certaine manière, il y a deux idéologies ici : l’une très individualiste et exclusive et l’autre très collectiviste et inclusive.
Deux visions des choses s’opposent, cela se fait ressentir dans l’interaction, ce qui crée immédiatement un blocage chez au moins l’une des personnes engagées dans la conversation.
Ce type de cas arrive aussi dans les relations amoureuses et cela peut rudement abîmer les sentiments amoureux.
Le tue-l’amour n’a rien à voir avec des histoires de sexisme, de body shaming, ni avec les discriminations.
Le tue-l’amour a peut-être plus à voir avec les valeurs et la vision du monde de chaque personne.
Une personne qui me rejette pour mon odeur corporelle, une personne qui me rejette parce que j’ai des problèmes gastriques, une personne qui me rejette car je ne m’épile… Et bien : bon débarras !
Il n’ y avait à la base pas d’amour mais d’autres éléments très négatifs, nocifs et toxiques.
L’amour, en revanche, s’il est vraiment là et pour ne pas le tuer doit être nourri de tolérance, de respect, de bienveillance, de paix, d’attention, de consentement, de bien-être, du soin de soi et de l’autre…
La liste des notions bienfaisantes est longue et vaut le coup d’être explorée et pratiquée, plutôt que de s’attarder sur des superficialités discriminatoires sans nom.
