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Être En Couple Ou Ne Pas Être En Couple ? Revisite De La Notion De Couple

Être En Couple Ou Ne Pas Être En Couple ? Revisite De La Notion De Couple

Il semblerait que, dans nos sociétés, la vie de couple soit la norme qui régit la façon de vivre l’amour ou parfois même d’autres types de relations humaines.

Le relation amoureuse devient synonyme de relation de couple et semble ne pas pouvoir se vivre sous d’autres formes que celle du couple.

Dans le couple normal – c’est-à-dire obéissant à la norme -, il y a une relation de couple qui est une relation amoureuse hétérosexuelle, exclusive, hétéronormative, composée donc d’un homme et d’une femme.

Depuis notre plus tendre enfance, nous nous imbibons de cette norme ou plutôt nous sommes imbibé.e.s par cette norme.

La plupart d’entre nous a des parents qui sont un père et une mère, et même dans les cas où le couple de parents est homosexuel ou autre, il reste souvent exclusive ou monogame, c’est-à-dire composé de deux personnes.

Il y a par ailleurs l’institution du mariage (et du divorce !) qui est toujours d’actualité et qui continue d’infuser dans les mentalités l’idée de ce que doit être le couple heureux, le grand amour, la vie de couple sur le long terme, la relation saine, elle se présente comme le ciment du couple.

Ainsi, l’institution du mariage met en scène le modèle du couple hétérosexuel, hétéronormé, monogame, qui lie un homme et une femme – qui sont par ailleurs des catégories biopolitiques faisant partie du système de domination patriarcal.

Le mariage a donc été lui-même au service du maintien du système patriarcal. Et il n’a pas toujours eu de rapport avec l’amour.

De beaux mariés avec des cierges dans un pré.

De nos jours, tout est (heureusement) un peu plus flexible. Bien que, dans certaines sociétés, ce ne soit pas encore le cas, dans d’autres, il est possible de vivre ses histoires d’amour avec qui bon nous semble et de la manière qui nous plaise.

En théorie. Car en pratique, les schémas existants sont tellement acquis et acceptés comme tels qu’il devient parfois très difficile de lutter contre eux dans sa propre vie privée et leur reproduction est souvent inévitable à moins de mettre en place un véritable processus de déconstruction.

Dans beaucoup de sociétés, et notamment dans les sociétés dites occidentales mais aussi celles dites orientales, l’Histoire du couple a tellement été marquée par le mariage hétéronormatif que malgré l’évolution du mariage et la libéralisation des moeurs, les normes maritales continuent d’avoir un grand poids dans nos pratiques.

On peut penser par exemple à la façon dont le célibat et donc les célibataires sont d’une certaine manière stigmatisés ou marginalisés.

L’idée selon laquelle le fait d’être en couple est une condition pour être heureux ou heureuse est malheureusement, chez beaucoup, bien ancrée bien qu’elle soit fausse – ou du moins pas très convaincante ou non démontrée.

L’Histoire du couple a une portée sur nos modes de vie et nos choix de vie personnels mais la fatalité peut être éradiquée en procédant à une déconstruction des pressions sociales et par-là même à un recentrement sur son propre bien-être et sur le bien-être collectif.

L’Histoire du couple dominée par l’institution du mariage

La première danse de la jeunesse. Les mariés dansent leur première danse.

Dans le Trésor de la langue française en ligne (TLFi), la première définition du couple est un :

” Ensemble de deux personnes unies par les liens de l’amour, du mariage. ”

Le couple serait composé de deux – exclusivité donc ! – personnes (youpi ! On ne mentionne pas la catégorie biopolitique !) qui s’aiment ou bien de deux personnes qui sont mariées.

Ici, on ne sait pas très bien quel est le lien entre l’amour et le mariage. Les deux concepts sont séparés par une virgule.

On ne sait pas s’il s’agit de soit l’un soit l’autre ou bien de façon interchangeable de l’un et/ou de l’autre. En tout cas, ces deux personnes sont unies par des liens.

Dans une deuxième définition, le TLFi décrit le couple comme étant un :

” Ensemble de deux personnes liées par un sentiment, un intérêt quelconque. ”

Le couple, ici, est alors composé de deux personnes qui partagent quelque chose ensemble, des sentiments, des intérêts, des projets communs. Au sein du couple, il n’y a donc aucune obligation pour que le mariage ou l’amour soient présents.

On peut penser ici à un couple de danseurs. Enfin, une définition intéressante du couple mentionnée par le TLFi :

” Dans un ménage, quand on s’entend bien, qu’on a très longtemps vécu ensemble, (…) on se sent liés par des sentiments profonds, une espèce d’entente sans explications, intérieure, inconsciente, (…) C’est ça qui fait qu’on forme un couple.

R. MARTIN DU GARD, Confidence africaine, 1931, p. 1122. ”

Dans la description du couple ci-dessus, la notion de couple serait plus fluide voire imperceptible et elle ne nécessite pas d’institution comme celle du mariage pour la faire exister ou pour qu’elle existe tout simplement.

Le couple dans ce cas existe du fait qu’il forme un ménage qui vit regroupé, du fait qu’il connaît une dynamique, qu’il connaît une bonne entente, qu’il a passé du temps ensemble, qu’il y a des émotions et des sentiments très forts, et qu’il n’y a plus besoin de mots pour se comprendre.

Le couple dans ce dernier extrait semble être une alchimie, résultat d’une certaine gestion du vivre ensemble.

Couple de personnes âgées faisant la vaisselle à la maison dans la cuisine

On remarque tout de même – par exemple dans la première définition du couple dans le TLFi – un lien qui est fait entre l’amour et le mariage. Il s’agit en fait d’une romanticisation de l’institution du mariage.

Le mariage a longtemps servi des intérêts familiaux, patriarcaux voire même nationaux.

Cela a aussi principalement pendant longtemps concerné et servi seulement les familles les plus puissantes, les plus riches, les plus ” nobles “. Le mariage était une affaire d’élite.

Ces affirmations sont confirmées par le philologue et historien Jean-Claude Bologne, invité sur France Culture dans l’émission Matières à penser de Rémi Frydman, le 17 septembre 2018 :

” Dans tous les modèles de l’Antiquité on ne propose pas le mariage à tous de la même façon.

On propose le mariage légitime (la forme la plus stable et la plus solennelle du couple) à des jeunes femmes de bonnes familles auxquelles il serait absolument impossible de proposer un concubinage ou une forme dévalorisée d’union.

Alors qu’aujourd’hui tous les modèles de couples peuvent être proposés à tous les partenaires possibles. ” (Jean-Claude Bologne, 17 septembre 2018, https://www.franceculture.fr/emissions/matieres-a-penser/histoire-du-couple)

On comprend alors que le mariage a évolué et qu’on a permis sa démocratisation et sa popularisation car à l’Antiquité, il fallait être une jeune femme de bonne famille pour avoir droit à la légitimité du mariage.

Par ailleurs, l’amour et la sexualité dans le couple (marié) n’ont pas toujours été des évidences :

” Il faut attendre le 16e siècle pour que l’on reconnaisse que le plaisir faisait partie de cette amitié conjugale et du simple témoignage de l’amour qui régnait au sein du couple. ” (Jean-Claude Bologne, 17 septembre 2018, https://www.franceculture.fr/emissions/matieres-a-penser/histoire-du-couple)

Le mariage, jusqu’au 16ème siècle, était donc seulement considéré comme une union légale, officielle, légitime.

Un arrangement collectif. La sexualité et le plaisir sexuel, on n’en parlait pas alors qu’ils sont des éléments importants de l’écologie du couple et de la vie du ménage.

Avec ce très bref aperçu de l’Histoire du mariage, on comprend que l’imaginaire du couple heureux s’est formée dans un certain cadre et que les individus ont calqué leur manière de penser le couple et de manière plus générale l’amour à travers ce moule hétéronormée, élitiste et patriarcale.

Or sur le plan individuel, il n’est en aucun cas nécessaire d’être en couple pour être heureux ou heureuse.

Être en couple, est-ce toujours compatible avec son propre bien-être ?

Vue de dos d'un couple assis dehors avec une bougie

La plupart d’entre nous a en tête le fait qu’être célibataire est à éviter, c’est perçu socialement comme quelque chose de négatif. On nous rabâche plus ou moins implicitement que pour être heureux ou heureuse, il faut être en couple.

La pression sociale est parfois très forte. Et plus on vieillit et plus elle se fait sentir.

Ces représentations ont en fait été forgées par des siècles et siècles de domination d’un système patriarcal.

Le capitalisme y trouve d’ailleurs son compte dans la stigmatisation du célibat et il permet à certains et à certaines de se remplir les poches avec par exemple des applications de rencontres très populaires comme Tinder.

Il n’y a pas de bonnes raisons pour justifier la nécessité de la vie de couple qui est en fait complètement fantasmée.

Être en couple ne va pas de soi. C’est une construction, un ” simple ” modèle social. Ça ne devrait surtout pas être un but en soi.

Les manières de vivre l’amour sont tellement diverses. L’amour a de multiples formes, elles sont infinies, et il n’est pas obligatoire qu’il soit vécu à deux, exclusivement entre un homme et une femme.

Tomber amoureux ne se décide pas. Ça ne se contrôle pas. Ça arrive, tout simplement.

En revanche, la manière de vivre l’amour devrait être incontestablement une liberté, un choix.

Car chaque relation est unique et a besoin de s’exprimer sous sa propre forme. Aucune relation ne peut entrer dans un moule préconçu et s’épanouir dans ce moule.

Il existe sans doute des personnes (très) amoureuses où le couple vit son amour d’une manière très normée mais il est certain que cette norme ne rende pas tous les individus heureux.

Pour être heureux et heureuse en amour, dans une relation amoureuse, les personnes engagées devraient pouvoir décider ensemble des conditions de vie de la relation.

Un couple s'embrassant dehors en hiver

Elles devraient pouvoir avoir la totale liberté de moduler leurs désirs de vivre la relation.

La pratique du consentement est ici plus que centrale.

Chacun et chacune doit pouvoir avoir la possibilité d’exprimer ses besoins, ses envies, ses limites, ses peurs, ses doutes, ses souhaits. Et ceux-ci devraient pouvoir être respectés dans leur totalité. Sans quoi, la relation ne peut continuer sainement.

Le bien-être devrait être au centre de l’attention. Le bien-être des partenaires ainsi que le bien-être de la relation. L’idéal est d’arriver à un équilibre qui convienne à chacun et à chacune.

Être en couple n’est pas une fin en soi. Il n’y a aucun mal à vouloir explorer d’autres modalités de l’amour. Rien ne doit être prédéfini. Tout doit être partagé et exprimé.

L’ouverture et la déconstruction permanente est la clef d’une relation humaine réussie.

Aimez-vous ! Prenez soin de vous, faites de votre bien-être votre priorité numéro une ! Comme l’exprime l’artiste Emmi Valve, autrice de bande-dessinée, dans sa très belle bande-dessinée Armo (2017), s’aimer soi-même est vital, c’est tout ce qu’on a et c’est la mission de chacun et de chacune d’entre nous.

L’expérience de l’amour est purement individuelle et personnelle et si on ne s’aime pas soi-même elle est impossible à partager avec les autres et à mettre en place des relations humaines saines, justes et épanouissantes.

Alors, être en couple ou ne pas être en couple ? Telle est la question.

Être En Couple Ou Ne Pas Être En Couple ? Revisite De La Notion De Couple